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Bio industriel

"Le modèle de la grande distribution est incompatible avec la Bio" selon Claude Gruffat.
Et pourtant : bio de la grande distribution = 47% des parts de marché / Filières spécialisées (Biocoop, La Vie Claire, ...) = 37% / Circuits courts (AMAP, ventes directes) = 18% (seulement).

"La Bio" telle qu'on l'entend dans sa globalité intègre un état d'esprit (voir une philosophie) dans lesquels s'inscrivent les notions de respect de la Nature, de la santé, des aspects sociaux, de la solidarité locale, de l'utilisation de semences anciennes et variées, d'une économie circulaire, ...

Aujourd'hui le label "bio" européen (et Français) ne réfère qu'à un marché commercial garantissent seulement la non-utilisation de produits chimiques et de synthèse ; et c'est tout.

Attention donc à la confusion dans l'esprit des consommateurs. Dans leur course aux parts de marché, les géants de la grande distribution ne remettent pas en cause leur modèle, ont recours à l'importation massive provenant de grosses exploitations industrielles, à l'encontre de critères éthiques, environnementaux et sociaux, et font baisser les prix au détriment des petites exploitations bio qui elles englobent toute une éthique.

Le bio industriel ne prend pas en compte les critères éthiques, environnementaux, sociaux

« La grande distribution achète des produits qui ont fait le tour du monde pour arriver dans l’assiette du consommateur français. [...] En général c'est fait sur le dos de gens qui sont payés moins de 2 euros par jour à l’autre bout de la planète » explique Claude Gruffat, Directeur Biocoop et auteur du livre "Les dessous de l'alimentation bio".
Ce qui va à l'encontre de critères environnementaux et sociaux.

 

En 2020, plus de 9 Français sur 10 déclarent avoir consommé des produits biologiques, et 13% en consomment tous les jours. De quoi allécher les grands industriels. Ainsi les procédés de l'agriculture conventionnelle s'appliquent de plus en plus à la production bio, avec de la mécanisation accrue, de grandes surfaces terriennes exploitées, de grandes quantités d'animaux dans les élevages, de la standardisation des produits et de la production mono-produit. Ce qui est peu compatible avec le respect des sols, la biodiversité, la régulation des rejets carbone ou le respect du bien-être animal. Nous sommes passés à une agriculture bio intensive importée massivement.

  

Que les productions industrielles soient bio ou pas bio, elles sont avant tout des productions industrielles. Ainsi les produits bio industriels ne sont pas protégés des maux de ce type d'alimentation : trop de sucre, trop d'additifs, trop de sel, trop de graisse, etc... Les graisses que l'on retrouve dans beaucoup de produits bio industriels telle que l'huile de coco sont de qualité médiocre. Les yaourts bio recèlent, - et parfois plus que la moyenne - d'ingrédients peu naturels tels qu'épaississants, colorants, arômes, gélifiants, ...etc.

Du point de vue de sa santé, acheter du bio industriel permet de ne pas s’exposer aux multiples effets toxiques des milliers de produits chimiques ou non naturels (aluminium, zinc, …) que contiennent ces produits ; en revanche, il ne faut pas faire cet achat en pensant prendre soin de soi sur le plan nutritionnel ou sanitaire.

 

Les conséquences du bio industriel sont nombreuses : monoculture, appauvrissement des sols, concurrence sauvage, spoliation des terres, exploitation de la main-d’œuvre,... Les effets tel que la baisse des prix et l'importation massive de certains de ces produits contribuent à la disparition du monde paysan, sans compter que les terres lointaines de l’hémisphère sud converties au bio ne nourrissent plus la population locale.

 

Le consommateur est ainsi berné, souvent persuadé qu'en achetant un produit labélisé "bio" en grande surface il mange plus sain et plus éthique, et fait un bon geste pour la planète... Les grandes enseignes se jouent des mots, et cette entourloupe es parfaitement légale.

Exemples

Œufs bio des élevages industriels

Selon la réglementation bio européenne, un élevage peut aller jusqu’à 75 000 poulets de chair par an, aucune limite pour les poules pondeuses. L’éleveur bio peut acheter la totalité de l’alimentation aux coopératives agricoles (alimentation industrielle (soja bio importé de Chine, contaminé un temps par la mélamine, ou du Brésil, ce qui entraîne la déforestation amazonienne)).
Des poulaillers de 12.000 voire 24.000 poules bio fleurissent en France, comme dans les Vosges

Fruits et légumes bio de cultures industrielles

Alméria en Andalousie (Espagne) : 33 000 ha de terres sous bâches (soit 47 134 terrains de football, ou 3 x la superficie de Paris) consacrés à la culture intensive. La main-d’œuvre émigrée sans droit y est surexploitée et vit dans des conditions difficiles. Les fruits et les légumes sont cultivés dans du sable recouvert de plastique, avec des nutriments bio délivrés par un système de goutte à goutte continu… La tomate espagnole colonise les rayons bio des enseignes de la grande distribution (Carrefour, Auchan, Leclerc, Lidl, Monoprix, Franprix) où elle trône toute l’année sur les étalages dans sa barquette emballée de plastique.



Ce que garantissent les labels

 

Le label français officiel du bio "AB" et sa réglementation européenne se réduit à un ensemble de critères n’imposant aucune limite à l’agriculture intensive. Par ailleurs les produits bio importés de pays hors Union Européenne ne sont pas soumis à la même réglementation pour l'obtention de labels.

Sous la pression économique, le label bio européen "AB" autorise maintenant 0,9% d'OGM dans les produits bio ainsi que des traitements médicamenteux par exemple.

 

Certains labels sont plus stricts que la réglementation européenne. Par exemple : Nature & Progrès, Demeter, Biosuisse, ou Naturland ont des cahiers des charges stricts qui notamment interdisent la culture hors-sol, la possibilité de produire des produits bio et non bio simultanément sur une même exploitation, interdisent un temps de transport des animaux de plus de quatre heures, limitent considérablement voir totalement l’adjonction d’arômes et d’enzymes. Les produits ainsi certifiés contiennent entre 50 et 75 % d’additifs en moins que ceux répondant simplement aux exigences européennes.

La Fédération Nationale d’Agriculture Biologique  (FNAB) et ses partenaires ont créé la certification privée Bio Cohérence, dont les premiers produits sont commercialisés depuis l’automne 2011. Avec une absence total d’OGM, une nourriture 100 % bio des animaux d’élevage, et la non-mixité des fermes, …

Certains producteurs refusent de payer les certifications et préfèrent par exemple les AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) - systèmes participatifs de contrôles fondés sur la confiance mutuelle entre producteurs et consommateurs - ou les paniers bio. Ces initiatives permettent de s’affranchir des intermédiaires, pour rémunérer directement de façon équitable les producteurs.

 

Petit tour des labels et de leurs garanties : c'est ici

Autosuffisance alimentaire en France

 

En 2019, la France présente un taux d'autosuffisance alimentaire de 80,4%, ce qui est un taux élevé.

Néanmoins derrière ce chiffre se cachent des disparités selon les produits, selon les régions, selon les lieux (urbain ou campagne), et se cachent également différents modes de production.

Par exemple la moitié des sachets de farines destinés au grand public sont importés (Allemagne, Italie principalement).

Nous importons plus de la moitié des fruits et légumes bios consommés en France, la production nationale demeurant insuffisante.

A contrario, une ville comme Mouans-Sartoux (région PACA) couvre 80% des besoins en légumes bio destinés à sa restauration collective.

Selon l'agence de l'environnement Ademe, en Ile-de-France 90% des produits alimentaires consommés sont importés, bien que 49% des territoires soient voués à l'agriculture. Explications ? : le nombre d'agriculteurs ne cesse de diminuer (14% en moins en moins en 10ans / 2,3% de la population active), et un de nos modèles "consiste à exporter des céréales à bas prix dans le monde entier et que pour le reste on trouvera toujours de tout dans les marchés mondiaux» selon Bernard Lannes, président de la Coordination rurale, 2e syndicat agricole français. «Il y a eu une volonté des grandes filières céréales, lait et viande d'accéder aux marchés mondialisés. On en oublie quelque part la réponse au marché intérieur», estime aussi Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne, 3e syndicat agricole.

Autonomie dans le Rhône

"Selon une étude réalisée en 2019 par le Grand Lyon, l’autonomie alimentaire du territoire ne serait en effet que de 5 %. Un chiffre certes au-dessus de la moyenne des grandes villes de France, qui pourrait néanmoins être bien plus élevé, au vu des surfaces agricoles existantes dans un rayon de 50 kilomètres autour de la métropole : à elles seules, celles-ci pourraient en effet nourrir jusqu’à 93 % de la population. Au lieu de ça, les productions qui en sont issues sont massivement destinées à l’exportation, via des centrales d’achats et des réseaux dédiés à l’industrie agroalimentaire"

"En outre, selon l’organisme Agreste rattaché au ministère de l’Agriculture, dans le Rhône, la production céréalière – essentiellement destinée à l’export – représenterait 34 % des surfaces cultivées, le maraîchage 3 %, et la pomme de terre seulement 0,35 %. Cette répartition inégale des cultures, de même que la diminution du nombre de paysans sur le département, passés de 14 500 il y a 30 ans, à 6800 en 2018, freinent l’apparition de réseaux de distribution capables d’irriguer massivement les différents bassins de vie de l’agglomération."

La solution si vous voulez adapter un comportement à la fois sain

pour votre santé, pour la société comme pour la planète ?

 

Mangez local et de saison. Evitez la grande distribution et utilisez les circuits courts qui aident au maintien des petites et moyennes exploitations en France. Le bio ne sera qu'un plus.

 

Les circuits courts aujourd'hui en France :

- les AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne)

- la vente directe sur les marchés ou à la ferme

- le magasins de producteurs

- les fermes cueillettes

- les groupements d’achat de consommateurs

 

En plus des bienfaits pour votre santé et pour l'environnement, sur le plan économique et social les circuits courts favorisent la vie de quartier et la circulation de l’argent dans la communauté. Ils permettent de recréer un contact entre agriculteurs et habitants des zones urbaines et périurbaines et de soutenir les producteurs locaux. Ils offrent une transparence sur la provenance de la nourriture, les prix et leur mode de production. En France, le commerce sans intermédiaire concerne un exploitant sur cinq pour l’instant.

 

Consultez également l'article "Circuits courts alimentaires locaux (envir. 15km autour du Val d'Oingt)"

 

Articles complémentaires

  • Manger local sur le territoire Beaujolais Pierres-Dorées
  • Transition : qu'entendez-vous par là ?
  • Compost et biodéchets

Références

Un article d'Isabelle Petit

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Commentaires: 4
  • #1

    Jean Marc (mercredi, 21 avril 2021 13:55)

    Sacré bon boulot et très complet
    Bravo�

  • #2

    Oum (jeudi, 22 avril 2021 03:24)

    Merci pour ce dossier, complet et documenté...!!!

  • #3

    Frédérique Nigay (dimanche, 25 avril 2021 00:04)

    Merci beaucoup, très intéressant, explications accessibles, documenté, ... A diffuser !

  • #4

    Marie jo et André (samedi, 15 mai 2021 10:26)

    Bravo pour ce travail qui ouvre les yeux sur trois lettres "BIO "...
    Et sous lesquelles se cachent un réel business pas toujours reluisant...il est toujours bon de chercher l'esprit sous la lettre !